Derrière l’objectif : Justin Wu

Justin Wu, un ancien étudiant en sciences, a suivi ses ambitions artistiques pour devenir un photographe de mode de renommée mondiale et un réalisateur de télévision et de films primé.

Justin Wu s’est inscrit à l’Université Queen’s, à Kingston, en Ontario, dans une majeure en biologie, soit la première étape de son cheminement pour devenir médecin comme son père. Il a obtenu un diplôme en biologie trois ans plus tard. Pendant ses trois ans, il s’est découvert une passion pour la photographie et a trouvé une nouvelle carrière à poursuivre.

Pendant sa première année, dans sa résidence étudiante, un des amis de M. Wu étudiait les beaux-arts. Il a encouragé M. Wu à se dévouer à ses intérêts artistiques. Bien que M. Wu passait beaucoup de temps à étudier la science, il a commencé à en consacrer davantage aux arts.

La mère de M. Wu était une artiste peintre et l’a toujours encouragé à développer son côté artistique. Il aimait faire des esquisses et dessiner. C’est son père qui lui a donné son premier appareil photo. « Il pensait que la photographie était un art plus rapide; un seul clique et c’est fait, n’est-ce pas? dit M. Wu. Il était loin de se douter que j’allais autant m’immerger dans la photographie, que je chercherais à en apprendre autant, que j’allais vouloir en faire une carrière. Je me suis vraiment lancé ».

Au cours de la même année, M. Wu a acheté son premier appareil photo reflex numérique. Avec des factures et des prêts étudiants à payer, il a travaillé de soir chez Camera Kingston. Son quart de travail étant normalement plus calme, M. Wu avait le temps d’observer les photographes et les photojournalistes chevronnés qui étaient ses collègues. Il avait également suffisamment de temps pour « étudier ». « Avec tous les livres qu’il y avait, j’ai baigné dans ce monde, plus qu’avec la biologie que j’étais censé faire », dit-il. « Je n’étais pas censé apporter mes travaux scolaires au travail. Il y a tous ces albums photo qui sont des ressources incroyables, alors je me suis assis pour parler aux employés et apprendre mon art de cette façon. »

Au cours de sa deuxième année, M. Wu a reçu un prix du Doyen pour le meilleur artiste émergent. Il était le premier étudiant qui n’était pas en arts à recevoir ce prix. « Ce prix m’a confirmé que je pouvais en faire une carrière. »

Après avoir reçu son diplôme de l’Université Queen’s, M. Wu s’est inscrit à l’Ivey Business School de l’Université Western en Ontario. Il a annoncé à ses parents qu’il souhaitait étudier l’entrepreneuriat, mais en réalité, il voulait savoir si la photographie était un domaine rentable.

Il est devenu l’éditeur photo du journal du campus. La section de style qu’il avait rapidement créé avait attiré l’attention d’une agence de photos à Toronto. Cet été-là, il a participé à un voyage de recherche à New York et a trouvé de nombreuses agences intéressées par son travail. « Le véritable moment décisif fut lorsqu’une agence a dit qu’elle aimerait me donner un contrat et me représenter en tant que photographe », dit-il.

Diriger son attention

À l’école de commerce, M. Wu a effectué une analyse approfondie des carrières dans le domaine de la photographie. L’analyse a rapidement révélé que sa première passion, la photographie artistique, n’était pas une option rentable. M. Wu voulait connaître le domaine qui lui donnait la plus grande liberté de création, qui lui permettait de respecter l’art et d’avoir du travail régulier et une clientèle.

« C’est le monde de la mode qui en est ressorti, dit-il. Les marques et les magazines veulent des photographes pour raconter une histoire et créer un tout nouveau monde. Ils permettent aux photographes de présenter quelque chose de nouveau plutôt que de se rendre à un endroit et de photographier ce qui existe déjà. Et c’était une idée que je pouvais présenter à mes parents et les convaincre, car il est possible d’avoir des clients réguliers. »

M. Wu travaille en tant que photographe professionnel de mode et de portrait depuis 2009. Il adore l’aspect collaboratif du monde de la mode et travailler avec différents créateurs, mannequins et stylistes. « Tout le monde doit faire preuve de créativité, dit-il. Ce n’est pas que la vision du photographe qui compte, mais aussi le point de vue que tout le monde amène pour contribuer à la narration de la scène. »

La photographie de portrait est quelque chose de plus personnel. « Pour moi, il s’agit de révéler une vérité sur une personne, affirme M. Wu. J’adore les gens et j’aime comprendre les histoires. La photographie de portrait me permet de découvrir leur vulnérabilité et de comprendre qui ils sont d’une façon plus personnelle. » Son objectif est de saisir le côté d’une personne encore inconnu. « J’essaie de comprendre leur histoire, leur motivation, ce qui les rend heureux ou craintifs, dit-il. D’une certaine façon, grâce à cette conversation personnelle, je peux en quelque sorte saisir leur essence dans une photo. »

Photographier avec une distanciation sociale

La dernière année a présenté de nouveaux défis. Les restrictions de voyage et les directives de distanciation physique ont forcé les photographes à trouver de nouvelles façons de créer du contenu. M. Wu a mis au point sa propre technique de photographie virtuelle. Ayant enseigné la photographie en tant que conférencier, il a créé un moyen simple pour expliquer la façon d’utiliser l’éclairage et l’équipement. Maintenant, grâce à Zoom, il aide les talents à configurer leur appareil photo sur un trépied, à créer leur éclairage et à régler leur équipement. Il a photographié des sujets virtuels, depuis Toronto, au sommet de l’Opéra de Vienne, et à Paris, à Los Angeles et à New York.

« Cette approche de la photographie virtuelle a ouvert plus de portes qu’elle en a fermé, dit-il. Et il pourrait s’agir d’une nouvelle façon de travailler parallèlement à la photographie en personne. »

Découvrir un nouveau moyen d’expression

Après s’être établi en tant que photographe, M. Wu s’est intéressé à la réalisation de films. Il a publié quelques-unes de ses premières vidéos expérimentales sur YouTube. Certaines sont devenues virales; l’une a mené à une commande pour diriger et tourner une vidéo secondaire de Jay Z pour la chanson « Empire State of Mind » sur sa plateforme Life + Times.

M. Wu aime utiliser deux différentes formes d’arts. Bien qu’il puisse appliquer des techniques similaires, chacune des techniques lui demande d’utiliser une partie différente de son esprit créatif.

« Ce qui m’a attiré [dans la réalisation de films] c’est de pouvoir raconter une histoire à ma manière, dit-il. La réalisation de film est une narration dirigée. Il y a un début, un milieu et une fin, et je fais voyager le spectateur.

La photographie est un art d’interprétation : je saisis une image comme je la vois, mais le spectateur doit en interpréter l’histoire. » S’il photographie une fille qui pleure, le spectateur puise dans sa propre histoire pour décider si elle pleure de joie ou de tristesse. « Pour moi, c’est la beauté de la photographie; je peins le tableau et je laisse au public les ingrédients pour imaginer ce que l’histoire raconte. »

La campagne The World Is in Our Hands (WIIOH)

Écologiste et activiste pour les droits de l’homme, M. Wu utilise sa photographie pour attirer l’attention sur les problèmes qui lui sont importants. En 2019, il s’est associé avec le célèbre avocat philanthrope Todd Krim pour cofonder The World Is in Our Hands (WIIOH), une campagne de sensibilisation pour le programme des Nations Unies pour l’environnement qui demande aux personnalités connues d’utiliser leur voix pour mettre en évidence l’urgence climatique à l’échelle mondiale. M. Wu prend des portraits en noir et blanc et les légendes qui accompagnent ses photos décrivent les mesures concrètes que prennent les sujets pour réduire leur empreinte carbone.

Des influenceurs, des activistes écologistes, des acteurs très connus, comme Joaquin Phoenix et Susan Sarandon, et même un chef d’État se sont joints à la campagne. « Je suis ému de constater toutes les différentes personnalités qui participent à notre initiative, dit M. Wu. Nous avons un grand nombre de personnes qui peuvent susciter le changement. Elles posent pour une photo simple avec une boule de cristal dans leurs mains qui représente littéralement que le monde est entre nos mains. »

M. Wu a récemment relancé l’initiative WIIOH pour soutenir la campagne #StandUp4HumanRights du Bureau des droits de l’homme des Nations Unies.

Projets spéciaux

M. Wu cite le projet WIIOH comme l’un de ses préférés. Un autre est Le devoir (« The Duty »), sa première percée dans la réalisation de films. Le court métrage est basé sur ses propres expériences, sa relation avec ses parents et sa sortie du placard. Le film lui a valu le prix du meilleur directeur émergent lors d’un festival de films admissibles aux Oscars. « Ce projet a confirmé que je pouvais être réalisateur de films en plus d’être photographe. » Depuis, il a réalisé un autre court métrage primé et un épisode de la populaire série canadienne « Kim’s Convenience » diffusée en continu sur Netflix.

Le prochain projet de M. Wu est un long métrage documentaire qu’il a écrit et réalisé en collaboration avec les Nations Unies. Son objectif est de mettre en lumière le voyage d’une réfugiée et d’aider à sensibiliser les gens face à la crise des réfugiés mondiale. Le film raconte l’histoire périlleuse d’une icône de la mode canadienne transgenre noire locale. Elle raconte sa vie, alors qu’elle a grandi au Kenya, les problèmes majeurs qu’elle a dû affronter lorsqu’elle a été obligée de s’enfuir et ses moments de triomphe pour surmonter les chances quasi impossibles de devenir la porte-parole principale des LGBTQ et des réfugiés au Canada. « Le film représente vraiment ce que signifie être un réfugié, dit M. Wu. C’est un projet lourd, mais très significatif pour nous tous. »

« Departure » mettant en vedette Gaia Weiss et Francesco Mura

Cette photo a été saisie lorsque je suis revenu à Toronto après avoir vécu près de dix ans à Paris. Elle incarne les sentiments doux-amers que j’avais au moment de partir et de commencer une nouvelle vie dans ma ville natale. Le lieu et les talents présentés ici mettent aussi en évidence mes deux passions : le cinéma et la danse. Sur la gauche, Gaia Weiss, une actrice de renom et l’une de mes meilleures amies, qui tend la main à Francesco Mura, le premier danseur du Ballet de l’Opéra de Paris, sur les marches du Palais Garnier de l’Opéra à Paris. 

« Pas de deux » mettant en vedette Gaia Weiss et Francesco Mura

Avec cette photo, j’ai essayé de renverser les attentes et de remettre en question la notion de masculinité et de féminité à travers la sensualité.

« Rite of Spring » mettant en vedette Andreas Giesen

Avec cette photo, saisie au début du printemps lors d’une belle nuit à Paris, j’ai fait appel à mes sentiments de légèreté, d’optimisme et de liberté en sachant que l’été est à l’horizon.

« Tough Love » mettant en vedette Laura Archbold

Ici, je voulais évoquer les sentiments d’apathie, d’anxiété et d’incertitude lorsque j’ai déménagé pour la première fois à Los Angeles et que j’ai dû vivre le rejet.

« Graziozo » mettant en vedette Francesco Comu, le premier danseur du Ballet de l’Opéra de Paris

Cette photo a été mon hommage au ballet et ma célébration de cette forme d’art que j’adore. Pour moi, la façon dont les danseurs peuvent exprimer un concept ou raconter une histoire par un geste, une position ou un mouvement est purement magique.

Justin Wu Photographe, Réalisateur

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